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Sortir d’une grève : un enjeu social … mais aussi humain !

grève

Mesurer les ressorts humains déterminants dans la gestion et la sortie de cette crise.

 

Une grève est un mouvement sociale qui prend sa source dans les conflits. Tout a commencé par le refus de nos deux DP (1 x CGT et 1 x CFDT, tous deux élus depuis plus de 5 ans) de signer l’accord de NAO (1) sur les augmentations annuelles, pourtant conclues sur un budget global de +2,7% dans un contexte d’inflation de 1,0% (en 2017), et qui reprenait pour partie des propositions de chacune des organisations syndicales.

Nous sommes dans une entreprise de chaudronnerie de précision de 150 salariés, située dans le centre de la France, et appartenant à un groupe nord européen de plus de 20000 salariés dans le monde. Le climat social y est plutôt apaisé, les prochaines élections étant prévues dans 6 mois.

Toujours est-il qu’à la suite du désaccord sur les NAO, l’élu CFDT décide d’appeler à un mouvement illimité de débrayages à raison de 2 x ½ heure par jour, en vue d’obtenir une prime exceptionnelle pour tous au motif que l’activité a été particulièrement soutenue tout au long de l’année, avec de nombreuses heures supplémentaires effectuées, dans les ateliers notamment.

Le mouvement enregistre au premier jour un taux de grévistes de 35% (principalement dans les ateliers, mais aussi quelques cadres), puis chute rapidement après une semaine, pour tomber à 7% au bout de 6 semaines, à l’issue desquelles l’élu CFDT décide de mettre fin au mot d’ordre de grève, sans avoir obtenu de résultat. Depuis lors le climat social est revenu totalement apaisé.

Ce qui ici intéressant, c’est de mesurer les ressorts humains qui ont prévalu tout au long de ce mouvement de grève, car ils ont été déterminants dans la gestion et la sortie de cette crise.

 

  1. Les motivations des acteurs

L’élu CFDT à l’origine du mouvement s’est dans un premier temps campé sur une question de principe : les affaires allaient très bien et, même si les augmentations proposées étaient bonnes à prendre, seule pour lui une prime d’exception marquerait une année exceptionnelle. En arrière-plan, il souhaitait aussi, à 6 mois d’un nouveau scrutin électoral, affirmer son leadership, lequel était assez contesté y compris dans l’équipe de production dans laquelle il travaillait.

L’élu CGT avait refusé de signer le PV de NAO par solidarité avec son collègue CFDT, mais en coulisse il se reconnaissait satisfait du résultat de ces négociations. En fait, outre son métier de soudeur dans l’entreprise, il avait par ailleurs sa propre petite exploitation agricole et c’est son « bon sens paysan » qui lui a dicté de ne pas suivre le mot d’ordre de grève de la CFDT. Il estimait tout simplement que l’entreprise avait accordé ce qu’elle pouvait après plusieurs années qui avaient été difficiles.

Le site connaissait sa 1ère grève depuis 5 ans, avec une nouvelle Direction en place depuis seulement 18 mois, et donc pas encore totalement « assise ». La hiérarchie du groupe a eu à cœur de soutenir la direction du site dans ce qui était sa toute première épreuve sociale, d’autant que le groupe ne voulait pas que ce mouvement d’humeur se propage à ses autres sites français.

Les RH étaient dirigées par un DRH à temps partagé, donc externe à l’entreprise et qui pouvait ainsi gérer la crise sans pression ; au pire il aurait facilement pu servir de fusible pour protéger le Directeur du site, ce qui n’a pas été nécessaire.

 

  1. L’accompagnement du mouvement de grève

DRH et Directeur du site n’ont jamais perdu le contact avec les deux élus. Chaque matin le DRH discutait autour d’un café avec l’élu CFDT notamment, occasion de faire le point sur le suivi du mouvement ainsi que les intentions du groupe (qui restaient fermes). Rapidement la discussion est venue sur « comment arrêter la grève » et la position délicate de l’élu CFDT d’autant que son collègue lui avait ôté tout espoir de rejoindre le mouvement.

L’élu CFDT communiquait assez peu aux grévistes, d’autant qu’il n’avait aucune avancée à annoncer, et se retrouvait assez logiquement de plus en plus isolé. De son côté la Direction avait bien sûr communiqué à l’ensemble des salariés l’issue de la NAO et les principes d’application des augmentations à l’intérieur du budget de 2,7%, sans omettre de remercier les deux élus pour ce résultat même s’ils ne l’avaient pas entériné par leur signature. Par la suite le DRH s’est assuré que les managers relayaient au niveau de leur équipe ce que représentait ce niveau d’augmentation, de façon à distiller le message sans nécessité d’insister via une communication plus institutionnelle qui aurait mis encore plus l’élu CFDT en porte-à-faux.

 

  1. Quelques enseignements

Il ne s’agissait certes pas d’une grève dure comme il y en a quelquefois, mais elle a justement permis de mettre en exergue quelques clés relatives à la gestion de crise.

D’abord bien se connaître entre élus et Direction : même si les interlocuteurs des deux DP étaient relativement nouveaux pour eux (nous l’avons dit pour le Directeur du site, mais le DRH aussi n’intervenait dans l’entreprise que depuis quelques mois), des échanges et discussions informelles régulières avaient lieu, en dehors des instances « classiques » (CE, CHSCT). Du coup à aucun moment les uns ou les autres n’ont pu se sentir personnellement mis en cause.

Respecter toutes les parties prenantes a aussi été essentiel : ne pas chercher à stigmatiser l’élu CFDT, ne pas non plus « trop en faire » vis-à-vis de celui qui était resté en dehors du mouvement.

Rester aussi à l’écoute, et seulement à l’écoute, de ce que des salariés, grévistes ou non, pouvaient çà et là dire de la situation.

Rester clair sur ses positions et intentions, sans chercher à manipuler ni surenchérir : jamais l’élu CFDT n’a pu se bercer d’illusion ni craindre une remise en cause de ce qui avait été au moins acquis lors des NAO.

Enfin penser à ménager l’avenir : les deux élus allaient remettre bientôt leur mandat en jeu, et au fond cette crise ne devait pas faire oublier le fait que le dialogue social restait de qualité et garant de possibilités de négociations à venir.

 

Pierre ROSIUS, DRH à temps partagé

(1) NAO : Négociation Annuelle Obligatoire

 

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